Jacques Jaubert

Jacques Jaubert
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Étudier l’appropriation du monde souterrain par les populations préhistoriques

Jacques Jaubert professeur de préhistoire à l’université de Bordeaux, travaille au sein du laboratoire PACEA1 (De la Préhistoire à l’Actuel : Culture, Environnement et Anthropologie ). Il travaille actuellement sur l’appropriation des milieux souterrains par les différents peuplements préhistoriques, afin de comprendre pourquoi les Hommes du passé se sont aventurés si profondément dans un environnement si contraignant. Nous allons découvrir ensemble le portrait de ce responsable du master Bio-géosciences de l’université de Bordeaux.

L’Homme s’est approprié l’espace souterrain depuis déjà bien longtemps dans le cours de son histoire. Les travaux de Jacques Jaubert et de son équipe nous permettent de le montrer très clairement. La grotte de Bruniquel située à Bruniquel en Tarn-et-Garonne dans la vallée de l’Aveyron est actuellement un de ses chantiers archéologiques le plus important. Cette cavité de 500 mètres de profondeur a livré des traces d’occupations néandertaliennes datant du Paléolithique moyen (il y a environ 180 000 ans). Ainsi, ce site est actuellement le théâtre des plus anciennes traces d’occupation du milieu souterrain par des populations humaines, qui plus est néandertaliennes.

S’isoler dans sa caverne

Afin d’étudier ce site, l’ancien adjoint au conservateur régional de l’archéologie de Midi-Pyrénées est contraint d’enfiler sa combinaison de spéléologie et de partir étudier les vestiges et les traces directement dans la grotte de Bruniquel. « C’est une archéologie de l’extrême » m’affirme-t-il. Travailler directement sur le terrain demande une préparation et une logistique millimétrées, car le temps sur place est compté, et ce afin de préserver le plus possible le site. Il faut anticiper au maximum, ne pas perdre de temps, il est important d’aller au plus direct dans ses relevés et son étude de terrain. C’est à chaque fois une réelle expédition qui demande des dispositions particulières car il s’agit d’un milieu qui contraint à l’isolement. D’autant plus que le site de Bruniquel a pour particularité d’être fouillé de manière non invasive, c’est à dire que rien sur le site n’est impacté : aucun sondage si ce n’est à l’entrée et le moins de prélèvement possible, tout le matériel découvert est laissé en place.

 Cette méthode permet ainsi de ne pas perdre la position précise de chaque élément retrouvé sur le site. Ce faisant le chercheur peut ainsi conserver une information des plus essentielles en archéologie : la répartition spatiale précise des vestiges.

"J’aime raconter ce que je fais. Il est essentiel pour moi de partager nos travaux"

Être en paix dans l’obscurité

Selon lui, travailler dans de telles conditions, pourtant tant contraignantes et intenses, est un réel plaisir. Le fait de se retrouver isolé, coupé du monde extérieur, comme dans une bulle, lui permet de se retrouver dans un état de totale plénitude. On se retrouve ainsi exactement à la même place que les Hommes du passé. De ce fait, il est plus aisé de comprendre comment ils se sont appropriés les lieux, ce qu’ils y ont fait et surtout pourquoi ils sont venus ici bas. Nous pouvons dire en quelque sorte que Jacques Jaubert étudie les premiers spéléologues de l’Histoire, il étudie la paléospéléologie, une discipline définie par un ancien conservateur en chef du patrimoine à Toulouse : François Rouzaud en 1997. Travailler directement sur le site pour cet ancien conservateur du patrimoine à la direction des antiquités historiques et préhistoriques de Provence-Alpes-Côte d’Azur est une chance et une joie réelles, « on se sent extrêmement privilégié de pouvoir être là » me dit-il, « certains de mes collègues me demandent pour pouvoir venir visiter le site, car peu y sont autorisés » ajoute-t-il. Bien plus qu’un travail de recherche à ses yeux, c’est un véritable privilège.

Faire rêver avec notre passé

Du point de vue de ce toulousain dans l’âme, ses études et ses champs de recherches sont à mi-chemin entre science et culture de manière générale. Pouvoir à la fois produire des données scientifiques et matière à divertir, à faire rêver les personnes, est pour lui un honneur et une fierté.

 

Plus que de faire de la connaissance pour de la connaissance, il créé de la culture, il donne au grand public à rêver et à s’émerveiller. Il est forcé de constater que les sites et les vestiges archéologiques de notre passé nous intriguent et nous fascinent depuis tout temps. Chaque grande découverte ou nouvelle en archéologie, notamment en préhistoire fait fréquemment la une des medias. Par exemple la grotte ornée de Cosquer située dans les calanques de Marseille qui a fait beaucoup parler d’elle depuis l’annonce de la création et de l’ouverture de sa reproduction à venir en 2022. Il y a une réelle fascination autour de ces sanctuaires souterrains chargés d’Histoire et de mystère. Cet ancien président de la société préhistorique française, avec ses travaux, nous permet donc de nous évader, de rêver, de nous amener avec lui dans un voyage de plusieurs milliers d’années dans notre passé et notre histoire. Aujourd’hui plus que jamais face à notre réalité parfois difficile, nous avons tous besoin de nous évader et de voyager, comme nous le permet aujourd’hui Jacques Jaubert, au travers de ses études sur l’histoire de notre patrimoine culturel.

Léo TREMOULET

Quand j’ai demandé à Jacques Jaubert dans quel lieu il se sentait le mieux pour travailler, il m’a immédiatement répondu : sur le terrain, en fouille archéologique sur les sites.

Que ce soit le côté grisant des préparatifs et de l’organisation des expéditions qui l’amènent parfois loin de chez lui à l’étranger, ou le côté travail collectif avec toute l’équipe de fouille qui se met en phase pour le chantier. C’est là que ce grand passionné de rugby se sent le mieux pour donner le maximum dans ses travaux de recherches, sur le terrain, auprès de son équipe de fouille.